Le Top films 2022 de la rédac

Vous en rêviez, nous l’avons fait. Après les Cahiers du cinéma, Télérama et l’incontournable Topito (à lire également leur top 17 des biscuits les plus déprimants), vos critiques en herbe préférés s’y sont collé. Nos chers membres se sont réunis en ce début d’année pour consacrer les meilleures sorties de 2022. Non sans débats ni désaccords, voici finalement le top 10 des films préférés de la rédaction Salles Obscures !

PS : Pour des raisons évidentes, un numéro vert sera mis à votre disposition dans les plus brefs délais pour toute plainte à l’encontre de nos choix concernant la crème de la crème des sorties de ces derniers mois. Pas qu’on en ait quelque chose à faire de vos griefs, mais on y met les formes.

10) Hit the road de Panah Panahi

Raté Cannes. Pourquoi mettre ce sublime premier film dans des sections parallèles ? Il surpasse la compétition officielle. Dans ce voyage dynamique au fin fond de l’Iran, un petit garçon porte dans son regard toute la bonté du monde. Innocent, inconscient des brutalités commises par le régime de son pays, il vit tout comme une aventure, pendant que ses parents cherchent la force de dire au revoir à leur autre enfant, qui semble déjà ailleurs. L’ailleurs que l’on cherche dans un système politique si répressif. Et oui. Le talent s’hérite. Panah Panahi égale son père (emprisonné par le régime iranien) dans sa quête perpétuelle de la liberté.

9) Everything Everywhere All At Once de Dan Kwan et Daniel Scheinert

Colosse tant attendu d’A24, EEAO s’est abattu sur la France comme un vent de fraîcheur en cet été 2022. 
Evelyn Quan Wang (Michelle Yeoh), mère de famille d’origine chinoise ayant immigré aux Etats-Unis, va devoir maîtriser les sauts entre les univers parallèles pour sauver ce qui est cher à ses yeux dans un monde où tout s’écroule. Cette comédie d’aventure tourne au patchwork absurde, entre science-fiction à la Matrix, film d’arts martiaux à la Kill Bill et drame romantique à la In the mood for love, qui fait passer du rire aux larmes. A travers une dizaine d’univers différents plus chaotiques les uns que les autres, elle explore le difficile rapport amour-haine d’une femme issue des premières générations d’immigrants chinois avec elle-même, avec son mari et avec sa fille.
Evelyn se bat contre ses propres démons, qui peuvent prendre la forme d’un antagoniste en costume d’Elvis, à coup de chorégraphies de kung fu mêlées au breakdance. 
EEAO est un voyage spatial au rythme délirant qui réussit à aller partout, tout à la fois.

 8) Decision to leave, de Park Chan-Wook

Sae-Jun est enquêteur dans la ville de Busan, rompu à l’exercice du métier et respecté de ses pairs. À la maison l’attend tous les week-ends une conjointe tirée à quatre épingles, pour laquelle toute passion est un lointain souvenir. C’est une enquête simple en apparence qui va l’arracher à ce train-train quotidien : il doit interroger une femme inquiétée suite au décès de son mari, employé de l’immigration à la retraite, retrouvé au pied d’une montagne qu’il avait pour habitude d’escalader. La veuve, bien plus jeune que ce dernier, immigrée chinoise travaillant comme aide-soignante, est suspecte à bien des égards. Pourtant, elle reste impassible lors de son interrogatoire et ne prend la peine de feindre ni surprise ni chagrin. Sae-Jun se lance alors à corps perdu dans cette enquête, et devient rapidement obsédé par son objet d’étude. Peu à peu les frontières se confondent, et les rôles s’interpénètrent : de suspecte à victime, d’observateur à objet d’observation, de soupçon à désir, et de dissimulation à passion. Et tandis que l’intrigue policière se dénoue, l’intrigue amoureuse creuse le sillon de questions existentielles toujours plus aiguës. Decision to leave évoque Vertigo ou Basic instinct, mais révèle sa propre originalité. La justesse des dialogues nourrit la profondeur de ce drame, dont chaque plan est une explosion de créativité formelle d’une beauté remarquable. Si quelques longueurs narratives peuvent être regrettées, le dernier long-métrage de Park Chan-Wook, prix de la mise en scène à Cannes, est indéniablement une perle rare.

7) Avatar : La Voie de l’Eau de James Cameron 

C’était très objectivement la plus grosse attente de l’année. Treize ans après le premier volet, plus gros succès de l’histoire du box-office mondial, le public a enfin pu découvrir Avatar : La Voie de l’Eau. La maîtrise technique est encore plus impressionnante que dans le premier volet. L’amélioration des technologies de motion capture rend les Na’vi encore plus réalistes. James Cameron perfectionne l’usage du HFR (High Frame Rate, nous en parlions ici) en ajoutant une fluidité dont découle un très grand plaisir dans les scènes d’action mais surtout dans les scènes subaquatiques. En passant de la forêt à l’eau, James Cameron donne un nouveau souffle à sa franchise. Les scènes aquatiques sont l’occasion de donner au spectateur une nouvelle faune et une nouvelle flore que le réalisateur esthétise à merveille. Ce passage à l’eau est aussi l’occasion de transmettre de nouveaux messages écologiques avec la dénonciation de la chasse à la baleine notamment.
Aussi excellent soit-il, Avatar 2 est un amuse-bouche, une introduction pour reprendre les mots de son réalisateur. Avec ce deuxième opus, nous ne pouvons qu’attendre le plat principal avec l’eau à la bouche.

6) Sans Filtre de Ruben Ostlünd

Palme d’Or 2022, nous avions hâte de découvrir le premier long métrage anglophone du talentueux suédois Östlund. Là où White Lotus ou Parasite réussissent à nous embarquer dans leur critique des hiérarchies sociales, Sans Filtre est prévisible et presque cliché. Pourtant cela ne suffit pas à gâcher la multitude de scènes jouissives où la sarcasme et le malaise transpirent par le discours des passagers richissimes. Entre le matriarcat final, l’allocution du capitaine marxiste et la satire du milieu de l’influence : Sans Filtre nous emporte dans une critique satisfaite de notre société. Nous retiendrons également des acteurs talentueux dont la regrettée Charlbi Dean et l’incroyable Harris Dickinson dans un rôle justement interprété. « Triangle of Sadness » en quelques mots : on vit dans une société.

5) The Batman de Matt Reeves

Le Chevalier Noir est de retour, et cette fois pour de vrai ! Dix ans après le dernier film solo du super-héros qui avait conclu la trilogie The Dark Knight de Christopher Nolan, c’était à Matt Reeves (Cloverfield, la Planète des Singes) que revenait la lourde de tâche de faire oublier les gros échec du Batman de Zack Snyder, et redorer le blason DC, complètement en échec depuis le départ de Nolan. Et quelle réussite ! Le film parvient complètement à capter l’essence du personnage, que ça soit dans la mise en scène et la photographie très sombre teinté de lumière rouge, et dans l’interprétation de Batman par Robert Pattinson. Il continue un peu plus de surprendre les spectateurs et la critique tant son évolution de carrière est démente, passé d’icône des adolescents dans Twilight à superstar du cinéma qui sera l’acteur principal du prochain long métrage de Bong Joon-Ho (Parasite). Puisant son inspiration dans les thrillers de Fincher tels Zodiac et Se7en, l’intrigue se construit comme un film à énigme sombre et violent, dans un ton similaire au Joker de Todd Philipps de 2019. Bref, il s’impose comme le blockbuster de l’année, et un des meilleurs films de l’année tout simplement.

4) Bones and all de Luca Guadagnino

Enfant terrible des passions plus ou moins dérangées de Luca Guadagnino, Bones and all offre à voir l’amour autant que le sang, la faim autant que le désir, les turpitudes autant que la noblesse. Conte amoureux de deux jeunes cannibales lâchés dans l’Amérique des années 1980, ce dernier film aura valu au Sicilien le Lion d’argent du meilleur réalisateur. Bones and all a su nous séduire par sa sensualité et son charme aux accents anthropophages. Ce road trip à travers la région des grands lacs donne à voir un couple d’acteurs aussi talentueux que passionnés, Timothée Chalamet et Taylor Russell crèvent l’écran tout au long de leur ballade, pour terminer en beauté dans un final sanguinairement amoureux.

3) EO de Jerzy Skolimowski

A quatre-vingt-quatre ans, Jerzy Skolimowski prouve qu’il n’a rien perdu de sa vivacité ni de sa vitalité en signant ce faux remake du chef d’œuvre de Robert Bresson, Au hasard, Balthazar. EO est une merveille d’expérimentation, un film sensoriel aux niveaux de lecture infinis qui suit une pauvre bête bien décidée à vivre, quitte à traverser l’enfer de l’humanité pour s’en sortir. Le martyr n’est plus, EO est en lutte, à l’image d’une époque troublée où seule la détermination l’empêche de sombrer. D’une constante inventivité visuelle, le cinéaste polonais convoque les spectres de sa carrière éclectique pour les remixer au drone et y introduire de magnifiques anachronismes. Au milieu de ce vacarme, des tréfonds de l’enfer humain surgit EO, être pur mais lucide, qui dresse un portrait tout en nuances de notre espèce. Un film sublime, punk, constamment déroutant.

2) Close de Lukas Dhont

Léo et Rémi, 13 ans, sont amis depuis toujours. Jusqu’à ce qu’un événement impensable les sépare. Léo se rapproche alors de Sophie, la mère de Rémi, pour essayer de comprendre. Après Girl qui avait remporté la Caméra d’or en 2018 à Cannes, Lukas Dhont revient avec Close et s’empare cette fois du Grand prix.  Avec une caméra toujours proche de ses personnages, le second long-métrage du réalisateur flamand nous laisse entrer dans l’intimité d’une relation, tout en restant pudique. Le film se garde de dialogues superflus, dialogues qu’il subordonne souvent aux silences et aux regards. Close ne parle pas de la nature de nos relations mais de notre rapport au rejet. La construction du film en deux parties, sujette à critiques, permet d’apporter une réflexion puissante et juste sur le deuil et la reconstruction. Juste, sensible et bouleversant, Close est un merveilleux moment de cinéma et mérite sans cesse sa place de deuxième meilleur film de l’année.

1) Licorice Pizza de Paul Thomas Anderson

Il nous avait manqué. Après cinq ans d’absence, Paul Thomas Anderson était de retour en 2022 pour notre plus grand plaisir. Loin de ses thématiques habituelles, le réalisateur de Phantom Thread a littéralement conquis les salles (et les cœurs de S.O.) en début d’année avec cette plongée dans le cinéma des années 1970. Tout démarre avec une rencontre fortuite entre Gary Valentine, 15 ans, et Alana Kane, 25. Enfant acteur effronté, Gary parvient à embarquer Alana dans ses aventures. Issue d’une famille particulièrement envahissante, cette dernière se laissera porter par les choix toujours plus rocambolesques du jeune homme. En résulte une histoire touchante et éloignée des schémas vus et revus du cinéma d’auteur romantique. Le petit plus non négligeable : la B.O. incroyablement seventies, immersion garantie !

Mention honorable : Falcon Lake, de Charlotte Le Bon 

Actrice chez Michel Gondry, Jalil Lespert ou encore Robert Zemeckis, c’est cette fois-ci de l’autre côté de la caméra que l’on retrouve Charlotte Le Bon. Elle adapte ici le roman graphique Une Soeur de Bastien Vivès, visé par une polémique à cause de ses dessins pédopornographiques – ce qui a son importance. Falcon Lake suit l’été de Bastien (13 ans) et Chloé (16 ans) qui développent une relation particulière. Filmer cette relation aurait pu être très problématique voire polémique compte tenu du support d’origine mais Charlotte Le Bon parvient à rester dans une certaine justesse. La caméra de la réalisatrice, toujours à la distance nécessaire, accompagne à merveille l’alchimie entre les deux comédiens du film, dont Sara Montpetit qui illumine la pellicule. La poésie de ce film réside dans son aspect morbide. De la flore morte à son lac en passant par la posture des personnages ou encore le symbole du fantôme, la mort et son inéluctabilité pèsent sur le film, s’entremêlant à cette rencontre singulière. La lumière de la pellicule se marie parfaitement avec les paysages naturels québécois pour nous offrir un film visuellement splendide. Falcon Lake est une histoire d’amour, de fantômes, de découvertes et de personnages qui ensemble vont trouver la place que le monde ne peut pas leur offrir. Assurément l’un des films les plus réussis de l’année. 

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