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On ne raconte plus l’histoire de Pinocchio. Et pourtant, le conte italien est sans doute l’un de ceux qui a connu le plus d’adaptations au cinéma, chaque version essayant de comprendre, de saisir la fascination entourant ce récit.
C’est dans cette grande tradition que s’inscrit la dernière version de la marionnette en bois, réalisée par Guillermo Del Toro. Le réalisateur du Labyrinthe de Pan nous invite à nous emmitoufler dans nos couvertures hivernales, à prendre un chocolat chaud et à découvrir le nouveau poème qu’il nous a confectionné.

Oui, ce Pinocchio en stop motion est un peu comme ces poésies de Prévert ou de Maurice Carême ou encore l’une de ces fables de La Fontaine qu’on apprenait par cœur. On est marqué par la douceur de l’œuvre, par ces messages qui se lisent différemment selon votre âge et ceux dont le sens demeure le même à 10 comme à 60 ans.
Un cinéma de la poésie
Del Toro plante son récit dans l’Italie de la première moitié du XXe siècle, dans une campagne italienne rêvée, qui semble préservée d’un monde en ébullition. Gepetto y est heureux avec son fils. Un certain équilibre semble régner jusqu’à ce que la réalité de la guerre le rattrape, lui arrache son fils et fasse basculer cet univers pastoral dans les affres du siècle. Des années passent, le temps n’a plus d’emprise sur le pauvre Geppetto qui se noie dans son passé, mais un soir, sortant de sa torpeur, il est pris d’un éveil quasi christique et se met à fabriquer ce qui sera Pinocchio.

A partir de là Del Toro nous emporte dans une infinité de thématiques, plus ou moins évidentes, plus ou moins bien traitées mais on a le sentiment d’un soulagement. Il déploie sa mystique et nous l’écoutons ; bercés par son récit et ses chimères, on ne peut que se laisser porter. On pourra s’appesantir à saisir chaque sujet abordé, son traitement, sa profondeur, sa pertinence… mais à quoi bon ? Ici, il s’agit de comprendre via nos sensations, nos sentiments. Comment faire autrement alors qu’il aborde à la fois le fascisme, la cupidité, la mort, la peur de celle-ci, le temps qui passe, la nostalgie, le mensonge et la vérité, l’éducation etc.
Il y a sans doute quelque chose qui relève de l’illusion de l’universel dans le regard que pose Del Toro sur le conte italien, mais comment lui en vouloir ? On en vient même à supporter Pinocchio, personnage proprement agaçant sur lequel le réalisateur va poser un regard bienveillant. Son message est clair, dépourvu de tout cynisme, et on ne saurait que trop le remercier pour cela.
Julien Mauricio
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