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Raté. À la Mostra de Venise, tous les prix lui sont passés sous le nez. Prétentieux, narcissique, inintéressant, voilà ce que les critiques lui ont reproché. Qu’en connaissent-ils ? Nos membres l’ont reçu de manière bien plus élogieuse et sincère. Bardo, Fausse Chronique De Quelques Vérités, marque le retour d’un artiste… et ça nous avait manqué.

La grâce l’avait touché dès ses précédents films. Une fois ses 4 Oscars en poche, Iñárritu souffrit du regard avec lequel le traitait ces concitoyens mexicains. Une bête de foire. L’envie de revenir aux sources était donc essentielle
Impossible à résumer. Le héros court dans un espace aride. Comme dans Birdman, il s’envole. Plus tard, attendant sa compagne dans un couloir d’hôpital vide, celle-ci infante: le nouveau-né ne veut pas sortir, le monde est bien trop laid. Iñarritu renoue non seulement avec son cinéma, mais avec lui-même. L’excellent Daniel Giménez, à la voix Jack-Nicholsonienne sous cigarette, joue Silverio, le sosie conforme d’Iñárritu. C’est son histoire qui est racontée. La réalité se mélange aux rêves : attachez vos ceintures, Iñárritu vous propose ici un voyage poétique et sublimement filmé (Darius Khondji) dans les méandres de son imaginaire. On rêverait d’en avoir le quart.

Bardo est un vrai geste de cinéma, emprunté aux maîtres comme Fellini. Le réalisateur de 8 1/2 doit se réjouir d’avoir trouvé son successeur. Silverio se dirige vers son destin, son imaginaire l’emporte : le réel est ennuyant, il ne compte plus. Les séquences de ce film, toutes à couper le souffle, forment un tableau démentant l’idée de Debord selon laquelle l’art est mort. Bardo est du cinéma pur, pour lequel il ne nous reste que le regret de ne pouvoir aller en salles le contempler. Si Netflix en vaut la peine, c’est pour ce genre de films. Chapeau, maestro.
Max Mességué